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Alumni : Après 9 ans d'entrepreneuriat, Olivier est aujourd'hui Product Manager chez Facebook
Alumni de CY Tech, Olivier Magnan-Saurin revient sur son parcours académique et professionnel
Pouvez-vous nous expliquer votre parcours ?
J'ai intégré l'EISTI directement après mon bac S et j'ai rejoint la prépa intégrée de l'école sur le campus de Pau, lorsque l'école était encore dans l'ancien bâtiment du Piano. J'ai etudié 4 ans sur Pau dans la filière informatique et j'ai profité du partenariat de l'école avec l'IAE pour participer aux cours du soir d'administration des entreprises à partir de la première année d'école d'ingénieurs. À la fin de la quatrième année j'ai eu l'occasion d'intégrer l'école de commerce de Grenoble pour obtenir un double diplôme commerce-ingénieur. J'ai donc saisi cette chance et suivi une année de cours à Grenoble avant de partir à Cergy réaliser ma dernière année d'étude dans l'option ICOM.
J'ai profité de mes années paloises pour créer, avec trois autres ex-EISTIens (Camille Dufau, Michel Pigassou et Romain Pommerolle), une marque de vêtements à destination des gamers qui s'appelait Nabla Wear. Ce fût un échec cuisant et nous avons dû fermer la société au bout d'un an, mais cela reste une super première expérience pour nous dans l'entrepreneuriat !
J'ai ensuite rencontré les 3 fondateurs de Wizbii, quand j'étais à Grenoble, que j'ai aidés à lancer la société et la plateforme pendant les deux premières années de vie de l'entreprise. Encore une fois une belle expérience avec beaucoup d'apprentissages.
Du coup à la fin de mes études j'étais convaincu d'une chose : je voulais créer ma boîte. Avec trois autres EISTIens (Michel Pigassou, mon acolyte de toujours, Anh-Vu Nguyen et Christophe Tauziet) nous avons donc lancé Fidzup en 2011 et l'aventure a duré 9 ans, avec des hauts et des bas, mais malheureusement nous avons dû fermer la société fin 2019.
9 ans c'est long... et j'ai eu envie de changer d'air et de me lancer un nouveau défi. Nous avons donc décidé avec ma femme d'aller nous installer aux États-Unis, l'occasion pour moi d'aller me frotter à la champion's league de la technologie dans la Silicon Valley. J'ai eu la chance de rejoindre Facebook en 2020 pour réaliser ce rêve et déménager à San Francisco, sous le soleil californien.
Quelles sont vos missions chez Facebook ?
Je suis ce qu'on appelle Product Manager. Je pilote une équipe technique composée de développeurs, designers, data scientists, etc. Mon rôle est simple et complexe à la fois : je dois m'assurer que l'équipe aille dans la bonne direction, délivre à la bonne vitesse des fonctionnalités qui ont du sens pour nos produits, nos utilisateurs et pour la société. Ça peut donc vouloir tout et rien dire. Un jour je discute avec des clients pour comprendre les problèmes qu'ils rencontrent dans leur quotidien, le lendemain je parle avec mon équipe de data scientist pour voir si ces problèmes se retrouvent chez beaucoup de monde via la data, et puis le surlendemain je peux m'assurer que les développeurs travaillent sur des fonctionnalités qui peuvent résoudre ce problème. C'est en tout cas très stimulant, les journées ne se ressemblent pas, et je retrouve une forte dimension entrepreneuriale même en étant dans une grosse société de la tech comme Facebook.
Durant votre cursus, vous avez participé au développement de Wizbii, pouvez-vous nous le raconter ?
En effet j'ai rencontré les fondateurs de Wizbii en 2009 quand j'étais à Grenoble. Une équipe de trois jeunes diplômés qui voulaient lancer "le bon coin de la création d'entreprise" et aider les jeunes à entreprendre. Autant dire que la mission me parlait !
Je leur glisse l'idée de créer un réseau social à la Facebook (comme quoi...) plutôt qu'un site de petite annonces, et nous voilà parti dans l'aventure Wizbii telle que vous la connaissez aujourd'hui. Je les rejoins dans la création de la société comme responsable technique et produit, et nous passons les mois qui suivent à concevoir la première version de la plateforme. J'avais d'ailleurs associé certains étudiants de l'EISTI, qui étaient en dernière année d'école d'ingénieurs à Pau en option ISIN, au développement de la version alpha de la plateforme dans le cadre de leur projet de fin d'études. Une belle expérience pour tout le monde !
Nous avons pu lancer officiellement et publiquement la première version de Wizbii au deuxième semestre 2010. Et 11 ans après je suis fier de dire que Wizbii s'est bien développée puisque ce travail initial a permis d'atteindre plusieurs millions de membres sur la plateforme et l'entreprise compte plus de 140 employés aujourd'hui.
J'ai beaucoup appris à cette époque sur le management de projets mais aussi sur le management humain. J'ai participé aux deux premières années de vie de cette entreprise, j'ai été témoin des hauts et des bas, et de toutes les choses qui ne sont pas abordées en cours. Comment motiver, convaincre, faire avancer vite un projet. Tout ce qu'on appelle les "soft skills" et qui sont tellement importants dans la vie.
Nous nous étions promis avec plusieurs amis de l'EISTI de créer notre propre société à la sortie de l'école, et cette expérience n'a fait que renforcer cette idée. Alors après deux ans aux côtés des fondateurs de Wizbii, j'ai assuré la transition de la plateforme et suis parti créer Fidzup.
Racontez-nous votre expérience de création d'entreprise Fidzup ?
La genèse de Fidzup se situe dans le projet de fin d'études que nous devions réaliser dans le cadre d'ICOM. Nous voulions développer une application mobile pour permettre aux commerçants de proposer leur carte de fidélité digitale à leurs clients (un peu comme l'application Fidme aujourd'hui). Après quelques mois à incuber l'idée dans le cadre du projet nous nous sommes lancés. Mi-2011, avec 4.000 € en poche, nous lançons la société et l'application, qui s'appelle Fidzup, par la même occasion. Christophe quitte rapidement l'aventure pour rejoindre Apple, mais Michel, Anh-Vu et moi continuons de mettre les bouchées doubles pour essayer de faire décoller l'app.
Le succès n'est pas vraiment au rendez-vous mais nous arrivons à mobiliser quelques dizaines de commerçants et 2.000 utilisateurs dans Paris. Ce qui nous saute aux yeux c'est que nos enseignes clientes nous demandent toutes de pouvoir vérifier la présence physique du client au sein de la boutique avant de lui accorder des points de fidélité. Pour éviter la fraude et envoyer des promotions quand les gens rentrent en magasin. Une technologie de géolocalisation en intérieur en somme, là où le GPS ne passe pas. Pour se remettre dans le contexte de l'époque, Android venait à peine de sortir et le bluetooth était encore ce truc qui envoyait des messages non sollicités sur l'écran d'accueil de votre téléphone... il fallait faire avec les moyens du bord. C'est dans ce contexte que notre technologie apportait toute sa valeur.
On se dit alors qu'il y a quelque chose à creuser et en quelques mois nous mettons au point une technologie basée sur les ultrasons qui permet, via un boîtier émetteur installé en magasin, d'envoyer un signal aux smartphones équipés de notre app, via le micro de ce dernier. Le succès de notre technologie est beaucoup plus rapide que celui de notre app et nous abandonnons très vite son support pour nous concentrer sur le développement de la technologie ultra-son. En 2013, nous arrivons à lever 350k € auprès d'investisseurs pour faire grandir l'équipe et l'aventure est lancée. Nous embauchons nos premiers salariés, passons à 10 salariés et passons un premier palier dans notre développement. Mais les choses ne sont jamais simples en entrepreneuriat. Si nous avons des premiers clients qui paient pour la solution, tout cela ne va pas assez vite à notre goût. Les solutions basées sur le Bluetooth low energy comme iBeacon se multiplient, et l'on a besoin de trouver rapidement la prochaine étape. On est en 2015, la boîte est sur le fil et l'équipe souffre. Michel décide de céder aux sirènes des US quelques années avant moi, et quitte Fidzup pour réaliser son rêve d'aller s'installer à San Francisco. Mais on s'accroche avec Anh-Vu. Inspirés par l'entrée en bourse de Criteo au Nasdaq, nous détectons une opportunité intéressante : utiliser nos technologies de détection de la position des smartphones pour mesurer si les gens viennent en magasin après avoir vu une publicité. Et là - bingo - les clients adorent.
On amorce une phase excitante, avec une croissance à 3 chiffres tous les trimestres. Nous levons 3 millions d'euros avec de nouveaux investisseurs, passons en un an de 12 à 35 salariés, ouvrons un bureau à l'étranger.
Et puis en 2018 est mise en application une nouvelle loi pour le traitement des données personnelles appelée RGPD, et malheureusement nous en faisons les frais. Notre secteur d'activité est pris pour cible par le gendarme des données personnelles en France appelée la CNIL, et nous servons d'exemple dans la presse pour mettre au pas l'ensemble de la scène tech française et européenne. Nous ne pouvons plus vendre nos solutions pendant plusieurs mois, le temps que l'on nous explique exactement ce que l'on doit changer et que l'on implémente ces changements. Cela sera fatal à la société, et même si nous nous sommes battus comme des beaux diables, nous devons nous résoudre à fermer la société fin 2019.
Cette expérience a forgé l'homme et le professionnel que je suis aujourd'hui, m'a fait faire des rencontres extraordinaires et m'a fait vivre des situations que je n'aurais jamais vécu autrement. Une aventure hors norme pendant laquelle j'ai appris énormément, sur les hommes, sur le monde de la publicité, sur la communication, sur des sujets technologiques auxquels je ne me serais jamais intéressé sinon. Et puis sur moi même.
En quoi CY Tech (EISTI) et sa formation vous ont aidé dans votre carrière? Quelles compétences apportées par votre formation vous servent aujourd'hui ?
Je ne code plus aujourd'hui, mais la culture informatique et mathématique que j'ai acquise pendant mes études m'a souvent permis d'être à l'aise pour analyser les nouveaux problèmes qui se présentaient à moi en tant que chef d'entreprise, et à les résoudre avec logique.
J'utilise beaucoup l'ensemble des cours de gestion que j'ai pu suivre à l'EISTI, l'IAE ou Grenoble École de Management. Que ce soit la comptabilité, l'économie, les ressources humaines, la gestion d'entreprise. Tout m'a été très utile, et cette double culture que l'on nous inculque à l'EISTI est très précieuse une fois en entreprise. Elle nous permet aisément de naviguer entre les besoins métiers des équipes business, et les contraintes techniques des équipes de développement. En somme tout ce que requiert mon métier de product manager aujourd'hui.
La liberté que l'école nous a donnée dans le domaine associatif a aussi été un énorme atout pour moi. J'ai développé de nombreux hard et soft skills en travaillant sur les projets pour le BDE, EISTI contest, et j'en passe !
Bref vous êtes entre de bonnes mains à l'école pour sortir de vos études avec un solide bagage technologique et managérial.
Quel(s) conseil(s) donneriez-vous aux futurs diplômés de l'école ?
N'oubliez pas que la création d'entreprise est possible à n'importe quel moment de votre carrière et avec n'importe quels moyens. Nous avons réussi à lancer Fidzup et faire progresser la société avec 1.000 € en poche chacun et 0 expérience professionnelle. Mon boss actuel a lancé Facebook sur un ordi portable quand il était encore étudiant et son idée est utilisée par 3 milliards d'humains aujourd'hui ;)
Ne vous limitez pas, écoutez vous et explorez toutes les possibilités quand vous sortez de l'école. Regardez un petit peu sur Linkedin ce que font les anciens de l'école et vous serez surpris de la variétés de métiers, pays, etc !