le 26 avril 2021
Publié le 26 avril 2021 Mis à jour le 4 novembre 2021

Géologie & H2020 Meet : Entretien avec Xavier Sengelen

Xavier Sengelen, géologue, assure l'animation et la coordination du programme européen H2020 MEET, dédié à la géothermie de type "systèmes géothermiques améliorés".

« Je suis géologue généraliste, orienté sur la géologie structurale de terrain. Mes expériences dans des contextes géologiques variés (chaîne de montagne de Taïwan, bassin de Franceville au Gabon, sismotectonique du Sud-Est de la France) m’ont permis d’aborder des thématiques d’étude toutes aussi singulières et passionnantes les unes que les autres.

Après 2 ans passés au laboratoire GEC comme ingénieur d’étude sur des projets de cartographie géologique, j’ai suivi une formation complémentaire en gestion de projet de géothermie à l’Université de Strasbourg. Ceci m’a permis d’intégrer le programme européen de géothermie H2020 MEET en juin 2018 au sein du laboratoire GEC de CY Tech pour 3 ans jusqu’à mai 2021. Mon objectif était de coordonner les actions du laboratoire sur ce projet, pour lequel nous étions impliqués sur différents volets scientifiques et pédagogiques. J’ai par ailleurs largement contribué à la réalisation des différentes tâches scientifiques du projet MEET associant le GEC. »

Laboratoire GEC de CY Tech  Equipe CY H2020 Meet

Qu'est-ce que le programme Européen H2020 MEET ?


« Il s’agit d’un projet de recherche et innovation qui s’inscrit dans le cadre du programme Horizon 2020 « Low-cost, low-carbon energy supply », sur le thème « Enhanced Geothermal Systems in different geological conditions ». Le projet est porté par ES-Géothermie, une filiale d’EDF dédiée à la géothermie en Alsace, et regroupe 15 partenaires représentant les milieux académique et industriel répartis dans 5 pays (France, Allemagne, Islande, Belgique, Croatie).

L'objectif principal de MEET est de tirer parti de l'exploitation de la plus large gamme de températures de fluide dans les centrales EGS (Enhanced Geothermal Systems) et les puits de pétrole abandonnés. Il s'agit de démontrer le faible coût de la production d'électricité et de chaleur à petite échelle dans des zones plus vastes présentant des environnements géologiques caractéristiques du sous-sol européen, dans le but de soutenir une forte augmentation des sites de production géothermique en Europe dans un avenir proche.

Afin de stimuler la pénétration de l'énergie géothermique sur le marché européen, l’objectif du projet MEET est de démontrer la viabilité et la durabilité de l'EGS pour la production d'électricité et de chaleur dans toutes sortes de contextes géologiques avec quatre principaux types de roches : granitiques, volcaniques, sédimentaires et métamorphiques, avec différents degrés d'empreinte tectonique par failles et plissements.

Le laboratoire GEC a été impliqué en apportant ses compétences de recherche sur pratiquement toutes les composantes du projet MEET, entre mai 2018 et juin 2021.»


Pouvez-vous nous parler des évènements "European Geothermal PhD Days" & "Geothermal Winter School 2021" auxquels vous avez participé ?



« Les deux évènements ont été organisés conjointement par le laboratoire GEC durant une semaine complète, du 15 au 19 février 2021, en mode virtuel compte-tenu du contexte sanitaire.

Les « European Geothermal PhD Days » (EGPD) est un événement annuel organisé par des doctorants de différentes universités chaque année. Il a été lancé en 2010 à l'initiative du programme conjoint de l'EERA sur l'énergie géothermique. Il s'agit d'un programme de formation de deux jours destiné à donner aux doctorants en géothermie de toute l'Europe l'occasion de se rencontrer, d'apprendre et d'échanger à partir de leurs propres travaux de recherche, de l’invitation de scientifiques reconnus et d'excursions sur des sites géothermiques. Les doctorants organisent le programme scientifique avec le soutien d'un comité scientifique. L’EGPD est un moyen de diffuser efficacement les connaissances scientifiques en géothermie en organisant un événement qui peut attirer de jeunes spécialistes. Il encourage les jeunes à s'intéresser aux géosciences et fournit un cadre pour établir des contacts, d'une manière qualitative qui est complémentaire aux interactions dans les grandes conférences. Il fournit une occasion dédiée et informelle pour les doctorants d'échanger avec leurs pairs et de développer leur réseau.
Le programme de ces deux premières journées était orienté sur la thématique « La géothermie dans une croûte soumise à des contraintes critiques », avec 4 sessions :
  • Géomécanique des réservoirs
  • Mécanique des tremblements de terre
  • Caractéristiques et propriétés des failles
  • Modélisation des processus géothermiques
Chaque session débutait par une intervention d’un(e) scientifique reconnu(e) et se poursuivait par des posters de doctorants introduits par des présentations « flash » groupées. La dernière après-midi était consacrée à des visites de sites de démonstration et de production géothermique en France, en Allemagne et en Islande.

En parallèle, l’un des délivrables du projet MEET dont le laboratoire GEC avait la charge consistait à organiser un évènement pédagogique afin de diffuser les résultats du projet auprès des futures générations de scientifiques en géothermie. Les cibles étaient les étudiants de niveau master des différents partenaires académiques du projet MEET, les doctorants et les post-doctorants du projet mais aussi d’autres projets européens de géothermie, et également les jeunes ingénieurs sous-sol à l’échelle européenne.
Grâce à la « Geothermal Winter School », le consortium MEET a fourni aux futurs géoscientifiques des retours d'expérience pratiques de la recherche et de l'industrie en géothermie. En effet, ce programme pédagogique avait pour but de transférer aux étudiants européens de nouvelles connaissances sur les EGS et les sites de démonstration étudiés dans le projet. Cette école de géothermie a ainsi mis en avant les principaux thèmes du projet MEET, au moyen de cours et d’études de cas concernant les grands thèmes suivants :
  • Systèmes géothermiques profonds pour la chaleur et l'électricité dans différents contextes géologiques.
  • Augmenter la production de chaleur à partir des installations géothermiques et des puits de pétrole existants.
  • Cartographie des meilleurs emplacements pour les futures installations en Europe et promotion de la géothermie profonde.
25 scientifiques ont ainsi contribué à cet évènement en partageant leur expertise en géothermie.

En complément de cette partie pédagogique, les participants à la « Geothermal Winter School » avaient également la possibilité de présenter leurs travaux de recherche durant des sessions de jeunes chercheurs chaque fin d’après-midi, après les cours.

Par ailleurs un webinaire public a été organisé pour vulgariser la géothermie auprès d’un public non-expert à l’échelle de toute l’Europe, depuis les professeurs de Sciences de la Vie et de la Terre jusqu’aux décideurs publics. »


Quel travail de préparation et d’animation ont été nécessaires ?


« Le travail de préparation de cette semaine de conférences et de cours a été pratiquement intégralement porté par le laboratoire GEC, bien que l’EGPD ait été organisé en collaboration avec les doctorants de l’Université de Neuchâtel (Suisse). Il a fallu lever des fonds internes et externes à l’université, constituer le programme de la semaine avec les scientifiques et les étudiants comportant plusieurs temps forts, mettre en place la plateforme en ligne présentant tout le contenu (résumés des conférences/cours, posters, résumés d’étudiants) et proposant les fonctionnalités de mise en réseau, et évidemment communiquer le plus largement possible pour attirer les étudiants européens et pour donner de la visibilité à notre évènement à l’échelle visée de l’Europe. Près de 8 mois de préparation ont été nécessaires pour mener à bien cet objectif pédagogique d’un genre nouveau.

En ce qui concerne l’animation, toute la semaine s’est déroulée en ligne sur des outils informatiques pour pouvoir assurer les cours et conférences à distance. Une équipe de 4 personnes travaillant au laboratoire GEC (Christophe Barnes, Cédric Bailly, Béatrice Ledésert et moi-même en coordination) a été constituée pour répartir la modération des échanges en ligne sur les différents sessions et temps forts de l’évènement. L’animation a nécessité une certaine préparation technique et logistique en amont pour s’assurer que tout se déroulerait sans problème. Il était indispensable d’être très disponible pour toute question des participants, avec de nombreux échanges avant puis en parallèle des conférences en direct, et un support technique pour la plateforme virtuelle. Par ailleurs, nous avons également communiqué sur les réseaux sociaux à différents moments de la semaine. »


Quels sont les bénéfices de ce type de projets ?



« Ils sont multiples. Tout d’abord la diffusion du savoir en tant que savoir et de manière plus large qu’à l’échelle d’une université, mais aussi la mise en réseau de jeunes chercheurs, la promotion de nouveaux concepts de géothermie profonde auprès de la jeune génération de géoscientifiques, ou encore l’état du marché de la géothermie en Europe et les potentiels de développement. Nous pourrions également citer la coopération entre la recherche et l’industrie, les possibilités accrues de débouchés académiques et industrielles pour les jeunes chercheurs grâce aux nombreux scientifiques de différents horizons impliqués dans le programme, mais aussi l’occasion pour les étudiants d’intégrer la communauté scientifique de la géothermie qui est de plus en plus visible, de part son rôle dans la mise en œuvre de solutions d’avenir en faveur de l’environnement.»